Parfois, j'aime l'Art pour rien.
Un peu de poésie.
Vous avez déjà entendu cette expression: « mon coeur est accroché au tien, comme une crotte au cul d’un chien » ?
Parfois j’ai un peu cette relation là avec mon art. Je l’aime pour rien. Il est là. Je m’y accroche et pourtant on dirait bien qu’il ne me remarque pas.
Et pourtant j’espère. Je rêve. (Et certains diront, « les rêves, c’est pour ceux qui dorment »). Être reconnu pour son art, c’est légitime comme rêve non?
J’aime mon art, et parfois il me le rend. J’aime mon art et pourtant souvent il me prend… mon temps, mon énergie, mes envies, mes soirées entre amis, ou en famille, mon style de vie, j’y pense la nuit, j’y pense dans le train quand j’ai la tête collée contre la vitre un jour de pluie.
Dans ma tête il y a des spectacles. Il y a des images. Il y a tout un monde. C’est toute une ville effervescente et quelle peine de se dire que peut-être… tout cela n’en sortira jamais. C’est un peu ça la vie d’artiste, essayer désespérement de donner vie à tous ces scénarios, s’autoriser à perdre la tête.
Essayez d’expliquer à une maman ingénieur, rationnelle et pragmatique, ce que vous faites à 27ans, en train de vous rouler à terre lumières éteintes et d’improviser avec une chaussette à la main sur les sonorités de la pluie qui tombe.
Essayez d’expliquer à vos amis qui achètent des appartements, sont à l’affut d’un CDI comme si c’était le « Graal », pourquoi ce énième voyage et cette soirée passée seule dans un musée vous a inspirée et fait comprendre à quel point le monde est un éternel recommencement et à quel point les énergies ne font que se transformer et jamais ne se perdent.
On s’en prend quand même plein les dents les artistes hein?
« Ouais, t’as pas de boulot quoi »
« Mais en fait, tu fais quoi en ce moment? Je ne comprends rien à ta vie »
Et pendant ce temps, ma chaussette est une baguette magique, et chaque goutte de pluie qui tombe est un écho qui résonne et m’entraîne dans de nouveaux mouvements. Je danse avec un orchestre, j’ai une costumière, un ingénieur son et lumière et de nouveaux outils qui m’aident à défier la gravité. La scène s’illumine dans un ballet de soie multicolore et… et.. et.. et.. « ah oui tu disais, est-ce que… quoi? Est-ce que je côtise pour la retraite? ».
Aïe.
Alors oui finalement je pense que pour avoir une belle relation avec l’art, il faut l’aimer pour rien, ou plutôt pour tout… tout ce qu’il apporte, tout ce qu’on peut vivre dans ce monde parallèle, tous ces voyages, toutes ces rencontres, les elfes, les princesses et j’en passe. Mon grand Amour pour l’Art existe et persiste, et si on est capable d’aimer sans rien attendre en retour alors je pense que l’Art nous aime en retour.