Et parfois le feu s’éteint. Et aussi « le doute », cette grippe de l’artiste.

Amour passion, amour passion.

La relation avec l’art reste une relation.

La routine s’installe, ce qui nous excitait il y a 7 ans ne nous excite plus aujourd’hui.

Mon feu s’est éteint. Parti. Et la partie la plus inquiétante?

JE M’EN FOUS.

On a tous eu des phases de « trop plein ». Durant lesquelles on nous a dit « il faut apprendre à se reposer, il ne faut pas abandonner ».

Et si celle-ci c’était le dernier trop plein?

La passion c’est autant d’amour que de haine, et le contraire de l’amour ce n’est donc pas la haine… c’est l’indifférence.

COMPORTEMENTS AUTOMATIQUES.

La danse c’est tout un réseau. Une communauté. Des évènements. Des méthodes. Des entrainements. Des chemins. Des « façons » d’être danseur, d’avoir une carrière.

Et il m’est arrivé quelque chose d’étrange il y a quelques semaines. Arrivée à un évènement, au bout de quelques heures, c’est comme si je m’étais réveillée de nouveau:

-Mais… qu’est-ce que je fais là en fait?
-Comment je suis arrivée ici?
-Pourquoi je suis venue?

Vous savez ce moment, ou vous êtes en voiture, que vous vous perdez dans vos pensées… et qu’au lieu d’aller ou vous aviez prévu d’aller, vous empruntez votre chemin habituel et quotidien qui vous ramène chez vous?

Une fois à destination vous vous dites « merde… j’ai vraiment conduis en pilote automatique. Je n’ai pris aucune décision… je suis juste arrivé(e) là ».

On en est là.

À cette espèce de croisée des chemins bizarre. Entre les habitudes, le « pourquoi on fait ça », « pourquoi est-ce que je suis encore ici », et le terrifiant « qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire d’autre? j’ai toujours fait ça ».

C’est terrifiant finalement. Terrifiant de s’en foutre. Et terrifiant de ne pas savoir quoi faire… mais là encore, pour tous les petits coups de mou il y a les « remèdes miracle ».

Tiens je vais faire un voyage dans un endroit inspirant, ça va me re-booster.

Mais le boost n’arrive pas… et c’est la panique… enfin normalement. Si seulement c’était la panique… ça voudrait dire qu’il reste encore de l’espoir.

-J’ai fait le tour de la question?

Peut-être, peut-être pas. On n’a jamais finit d’apprendre.

Parfois je trouve qu’on s’écoute TROP. On passe les phases d’euphorie productive, on tombe dans une phase de remise en question et de doute, et on angoisse pour le passé, le présent et l’avenir en même temps. Et plus rien n’a de sens.

La méthode la plus efficace que j’ai trouvé pour l’instant, c’est de m’ignorer un peu. Les phases de « mou » ne sont pas productives et douloureuses, mais mon art ne s’en va nulle part et ça finit toujours par repartir. Alors j’me suis dit que le doute finalement, c’était la grippe de l’artiste. Et quand on a la grippe, penser qu’on va y rester ne nous aide pas. Alors on mange de la soupe, on se repose et ça repart.

-Et toi, quand t’as la grippe, est-ce qu’à chaque fois tu te dis « je vais y rester! » ?

Alors avec l’art c’est pareil. Si je vais y revenir dans tous les cas, alors autant ignorer ma petite phase de doute et attendre que ça passe.

-Et si ça ne revient pas?

Cette idée de relation avec la danse m’est venue très tôt, grâce à mon premier mentor « Elle aime la danse… mais pas que… la danse l’aime aussi ».

Et là je me demande si il y en a toujours un des deux qui aime plus que l’autre? ou si parfois on n’aime plus?

Le schéma de la relation est le suivant:

Le début, excitation générale, cristallisation Stendhalienne, ma passion est parfaite et géniale. Je déplacerais des montagnes pour l’amour de l’art.

Puis les habitudes s’installent, mais ça roule! On s’aime!

Là commencent les disputes, on fait quelques tentatives pour remettre du piment dans la relation, mais on commence un peu à perdre patience. « C’est toujours pareil avec toi ».

Déception: ce n’est pas ce que j’imaginais. « T’as changé hein… »

Et maintenant… on se sépare?

C’est fou ce cycle artistique, qui va de l’obsession totale à la conclusion que tout cela n’a pas de sens. Valse cyclothymique éternelle.

Et comme tous les amours passionnels… c’est infini… et c’est souvent quand la fin est proche, que le feu repart.

Et non, on ne fera pas honneur à la réputation de notre génération, qui jette au lieu de réparer.

Et si l’on se sépare… c’est pour mieux se retrouver.